Les taxis de Bali

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Les taxis de Bali

Où l’on se promène sur l’île heureuse (non, ce n’est pas Baffin) sans déjouer tout à fait les astucieux comédiens du syndicat des taxis

Il y a des invraisemblances, en voyage, qui font sourire. On les regarde une première fois sans comprendre, sans réaliser surtout qu’elles se répéteront jusqu’à être lassantes d’abord et drôles ensuite (un peu comme les belles-mères). Et qu’elles deviendront enfin presque importantes. Tenez, je vous donne un exemple. Vous êtes à Bali. Mais oui c’est possible. C’est arrivé à des plus bêtes que vous (je ne donne pas de nom). Donc Bali. L’île est un trésor de rizières en courtes terrasses. Celles-ci paraissent grimper d’un pas traînant vers les quelques volcans du nord qu’on voit apparaître parfois au-dessus des nuages comme s’ils étaient coupés de l’île. Il y a dans ce paysage une douceur joyeuse. On le regarde s’étaler vers le haut, sans brusquerie, sans véritable effort, et on comprend enfin pourquoi les balinais ont toujours porté leur regard vers la terre jusqu’à oublier l’océan. Bali ce n’est pas une plage. Pas du tout. C’est bien mieux que cela. C’est un riz qui pousse aussi doucement que les jours.

Vous marchez donc là-dedans, les jambes un peu usées tout de même par la chaleur ambiante. Et voilà qu’à Ubud (j’aurai pu écrire Sanur, ou Denpasar, ou Lovina, ou Amed, mais c’est tellement plus beau Ubud !) quelqu’un remarque que votre pas se traîne un peu. Il vous regarde alors sans bouger d’un pouce, sans se lever d’un poil, et vous dit : Transport ? Voilà, c’est dit. Pour faire joli, il ajoute le geste d’un volant qu’on tourne. Les meilleurs, les vrais professionnels je veux dire, font le mouvement mais sans la voix. C’est magnifique. Il faut imaginer tout l’entraînement, la longue quête du geste parfait, de celui qui veut tout dire et surtout ce qu’on veut. Quel talent ! Quelle abnégation ! Bien sûr, vous dites non. Après tout, marcher est un plaisir. Peu découragé pourtant, votre homme demande encore : Maybe tomorrow ? Et vous dites non une seconde fois. C’est à croire que le mot est donné. Dix fois, vingt fois, le même geste accompagne le même mot et le « peut-être demain » suit immanquablement, comme un dessert suit un repas. C’est une habitude à prendre. Beaucoup s’énervent de cette répétition. Étrangement, pas moi. Il arrive même que je ferme les yeux, dans un pays froid et gris (je ne donne pas de nom), et j’entends résonner alors ce transport comme un vent chaud. Ce mot est devenu une porte. C’est avec lui que Bali existe. Et lorsque j’y reviens (c’est arrivé à plus bête que moi), j’attends avec impatience l’instant magique où le premier chauffeur osera me le demander. Je prends un air fatigué, je joue à être perdu, à faire le touriste tout neuf et naïf, tout frais venu de son Amérique improbable, afin de précipiter le moment où cette musique et ce geste redeviendront quotidien. Ce transport me transporte presque de joie.

Pourtant, hier on m’a surpris. Je ne m’y attendais pas. Il avait dit transport le plus simplement du monde. J’avais dit non comme toujours. Le maybe tomorrow n’avait pas manqué de suivre. J’étais chez moi ! Je pouvais sourire. La chose était dite. Mais voilà que le drôle, pas satisfait d’avoir terminé, ajouta encore : The day after tomorrow then ? J’étais estomaqué. Vous vous rendez compte ! On n’est plus chez soi nulle part.

Pascal

3 Comments

  • Raymond Philippe

    Salut Pascal Guillaume!
    Juley!

    On ne se connait presquement pour ainsi dire … à peine! C’est à moi que t’avais donné des conseils sur le comment des « bed bugs de monastères » alors que je me préparais à partir au Ladakh avec Antoine et poursuivre le merveilleux voyage des Karavaniers, « alone », « tu-seul » au monastère de Rizong, le mois suivant le fabuleux treck.
    Depuis, je suis retourné au Ladakh à deux reprises, seul, puis j’ai participé au Farm Project de l’ISEC. J’y étais encore tout l’automne dernier pour aider mes amis ladakhis a procéder aux dur labeurs des récoltes . Quel BONHEUR! J’ai des amis là-bas et j’ai même la joie de financer les études de deux des garçons de la famille.
    On sait pas où ça peut nous conduire vos expéditions! 🙂

    Puis nous voilà en mai 2007. Je prépare déjà une quatrième aventure au Ladakh pour l’automne 2008, question d’aller célébrer mes cinquante ans avec… « les miens », mais en attendant, je m’organise une petite virée à Bali! Hé oui! Quelle belle bêtise! Ça me changera du Ladakh (…mais puis-je en changer?) . Tou ça pour dire que ton article tombe pile: j’étais en train de terminer mes réservations d’hôtel! Je voyage avec mon copain qui est handicapé, so… hôtel and beach! Mais certainement de belles petites excursions dans la mesure où ça sera possible à deux et avec une chaise a roues 🙂
    Merci pour la fraîcheur de tes propos! On songeait justement à aller vers Ubud!
    Bon voyage à tous ceux qui partent en… Karavaniers!
    Je sais déjà que vous vivrez une grande et belle aventure!
    Raymond Philippe

    04/05/2007 at 8:56
  • France Gendron

    Bonjour Pascal,

    Je ne sais pas si c’est toi qui guide Sulawesi cette année. Je me suis inscrite et j’en suis forte heureuse. Ce ne sera pas facile, je vais sûrement pleurer comme d’habitude mais je suis certaine que ce sera un voyage merveilleux. Si jamais tu es le guide, et si jamais tu as terminé d’écrire ton bouquin, je suis toujours intéressée à en avoir une copie. En retour, s’il ya un titre de livre que tu aimerais avoir, je peux te l’apporter.

    J’ai bien hâte de partir!

    France Gendron
    Baie-Comeau

    15/05/2007 at 10:19
  • Delphine

    Bonjour Pascal,
    Ha, j’ai aimé lire ce billet qui me transporte en 2 mots à Ubud, près de la petite source de la forêt des singes, le petit coin qui ressemble à un décor d’Indiana Jones.
    Comme un tas de gens, depuis ce voyage, chez nous c’est obsessionnel, encore quelques années et on va vivre à Bali, d’une façon ou d’une autre, c’est décidé. En attendant, on fait semblant d’y être déjà grâce à notre jardin déguisé en Tannah Lot. Mais mon ado, lui, n’en démord pas, à 15 ans on sait ce qu’on veut, et ce qu’il veut, c’est passer toutes ses vacances là-bas. Il est déjà parti avec une bande genre Karavaniers qui organise des séjours itinérants à l’étranger pour ados, ça s’appelle « sans frontières », tu connais peut-être ? Mais eux, malgré qu’ils annoncent l’Indonésie au programme, ne la font pas. Du coup, il est parti en Espagne. Je me dis, je vais me renseigner auprès de Pascal qui connait les organisateurs de voyages et Bali. Connais-tu quelqu’un qui fait ça ? camps d’ados à Bali ? Tu crois que çà existe ? As-tu croisé des Holly Colonies de vacances ?

    Si tu as une idée sur la question….
    En attendant, je continue de te lire avec plaisir !

    31/05/2007 at 9:17

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