Souvenir d’Indochine…

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Souvenir d’Indochine…

Discrète aubade au plus agréable groupe du temps des fêtes. Noël au Laos. Le pastis de l’amitié devant le Mékong et le crépuscule.

Laos : J’adore le temps des fêtes dans l’ancienne Indochine. On peut préférer les ripailles gargantuesques des festivités québécoises, mais pour mon goût rien ne vaut la quiétude sereine d’un pastis devant le Mékong ni la douceur élégante des repas à l’ombre des villas coloniales. Cette nonchalance-là me plaît. Cette langueur asiatique à peine fardée de la moins lourde ardeur occidentale, c’est-à-dire une baguette chaude pour accompagner l’aube, une véranda aux lierres enlacés pour supporter le soleil ou un café aux chaises profondes pour ajouter à la nostalgie du crépuscule. Tout y est d’une gaieté heureuse et facile.

Néanmoins, il faut aussi de la compagnie. Un pastis n’est bon que s’il se trinque à plusieurs. Un repas n’est grand que s’il nous étouffe davantage de rires que de victuailles. J’ai donc envie de vous parler ici du meilleur groupe du temps des fêtes, je veux dire le plus follement drôle, le plus soudé, le plus désarmant. Imaginez-vous avec nous quelques jours après le nouvel an, au milieu d’un monceau d’îles sur le Mékong. Le voyage s’achève. Une courte terrasse de bois domine le fleuve et des orchidées en pots se balancent au bout des cordes. Le soleil glisse à l’ouest. Un homme doux nous verse alors de l’alcool en redisant pour la millième fois (j’en ai déjà parlé) un thank you very much attendrissant et inutile. Commence alors la plus belle veillée du voyage, la dernière. Nous nous donnons des surnoms et nous en abusons. Musaraigne infernale parle comme un charretier sur acide en relatant la grotte qu’on avait exploré ensemble, Anguille sous roche pouffe joliment sans trop dévoiler ses cartes, son mari Dindon anxieux nous raconte avec une bonne foi savoureuse ses anxiétés de voyage continuelles et hilarantes, notre Coquerelle à tête chercheuse reste tout à la fois peu encline à supporter les insectes et plutôt prompte à remarquer les jeunes hommes et Belette cochonne rit aux éclats du nom vaguement scandaleux qu’on a trouvé pour elle. Quant au guide, il s’appelle désormais Grosse marmotte atypique. Grosse car je ne suis pas le plus frêle, marmotte car les matins sont faits pour dormir (que diable !) et atypique parce que je les emmerdais beaucoup en répétant que ce circuit du temps des fêtes, mieux apte à remplir les gosiers qu’à user les souliers, n’était pas tout à fait une normalité chez Karavaniers. Nous avons ensuite laissé le soleil expirer à l’ouest, le Mékong disparaître, la fraîcheur s’installer que nous étions encore sur la terrasse en bois à rigoler du bon temps indochinois et du bonheur doux-amer d’être très simplement ensemble.

Ce que j’essaie maladroitement d’exprimer sur cette page, c’est qu’un voyage n’est jamais seulement qu’une destination qu’on coche sur une carte du monde. C’est aussi un moment qu’on partage. Il aurait été facile de s’exalter séparément de Luang Prabang, de Vientiane ou de Wat Phu, d’avoir un Laos merveilleux à raconter aux autres et un voyage présenté ensuite depuis la tour étroite d’un seul point de vue. D’ailleurs, il est toujours plus compliqué d’accepter les travers et les excès des autres. Alors quoi ? C’est justement cette rareté-là que je voulais nommer, cet effort, cette tolérance, cet équilibre. Peut-être serez-vous les prochains à partir avec nous au Laos ou ailleurs, à deux, à six ou à douze. Il ne dépend jamais de vous qu’un pays soit beau (il l’est toujours). Mais il en dépend beaucoup pour qu’un voyage le soit et qu’on s’installe ensemble, le dernier soir venu, devant un pastis qu’on oublie de boire tellement on se regrette déjà.

Laos « Lorsque le Mékong est roi »
Randonnée-Trek / niveau 2

Pascal

2 Comments

  • Julie

    Comme ça me rappelle de beaux souvenirs!! C’est un beau clin d’oeil Pascal! J’y retournerais sur cette terrasse n’importe quand:)

    21/08/2008 at 17:21
  • Marie-Julie

    Wow!!! Je n’aurais pas pensé qu’un jour tu écrirais sur nous avec de si beaux mots. Ton texte est magnifique et très touchant. En le lisant j’ai eu un petit moment d’émotions tout comme nous avons eu cette fameuse soirée. Merci encore pour ce beau voyage que tu nous as fait vivre en 2006!!!
    D’ailleurs, nous essayons, le groupe, de se voir environs 1-2 fois par ans.
    Take care

    23/08/2008 at 10:34

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